Le DEJJ à Saint Fons : Souvenirs
Je me souviens de l’arrivée des pieds noirs en Métropole et de l’accroissement immédiat de la communauté juive … à Saint-Fons/VénissieuPersonnellement, je ne me sentais pas très concernée. Si ce n’est la colère de mon père lorsque mon frère ainé a épousé une non-juive et les fêtes traditionnelles comme Kippour et Pessah. Je menais une vie en dehors du judaïsme. Je pense que la Shoah, vécue par ma famille, explique son éloignement du judaïsme. L’assimilation avait gagné ma famille ! »
Mon père faisait partie du comité de la communauté juive de Saint-Fons où il a exercé les fonctions de Secrétaire puis de Président puis de membre actif !
Un jour, nous avons appris qu’un couple d’éducateurs, Salomon et Esther Abitbol, s’installait dans la Maison des Jeunes, allée Picard et avaient pour objectif de ramener les jeunes de Saint Fons à la vie juive. Ce qui avait choqué Salomon c’est que les membres du comité de notre communauté de Saint- Fons se préoccupaient des enterrements rituels, des célébrations des bar mitzvot et sans doute des mariages…c’était bien, mais pas suffisamment de l’éducation juive des enfantsMon père nous a demandé d’aller à une première réunion où j’ai rencontré Salomon et Esther…. Je pense qu’à l’époque ils n’avaient qu’un seul garçon, Marc.
Un peu sur la réserve, j’assistais à des oneg shabbat… Je questionnais et Salomon répondait toujours patiemment à toutes les questions en disant qu’il y avait beaucoup de mitzvot (ce que l’on devait faire ou pas) mais que c’était notre choix… J’appréciais cette liberté, cette absence de contrainte…
J’ai, grâce au DEJJ, eu l’occasion d’assister à Paris à des conférences de Manitou, ce qui évidemment me subjuguait… Je crois que dans ma tête, je me suis réellement « convertie » au judaïsme à ce moment-là et ma manière de le faire (dans ma tête) a été de décider de ne plus manger de porc… Et jusqu’ à ce jour, je n’en ai plus jamais mangé…
La patience de Salomon, la positivité du couple… Il n’y avait pas grand monde à nos activités, ce n’était pas grave, il fallait continuer.… On n’avait pas tout ce qu’il fallait ; nous devions être astucieux et parfois faire avec des « bouts de ficelle » …Les colonies du DEJJ où j’ai exercé en tant que monitrice (j’avais mon BAFA), puis (un peu malgré moi) à la direction d’un camp d’ado en Corse m’ont permis de me responsabiliser, de connaitre les vrais shabbat (pas ceux où on s’accommode) ….
La déception a été grande quand Esther et Salomon ont décidé de faire leur Alyah en 1977 avec leurs cinq enfants. Depuis nous sommes toujours restés en contact et je reconnaissais le couple à nouveau impliqué dans la vie israélienne, à monter des projets sans jamais donner un signe de lassitude…
Des amis tels que Bélier et d’autres ont marqué ma jeunesse… J’aurais aimé fonder un foyer juif, avoir des enfants et aller en Israël…
Le destin en a décidé autrement !!! J’ai eu une fille qui vit aujourd’hui en couple depuis 17 ans avec un coreligionnaire juif rencontré lors d’un voyage organisé par TAGLIT…. Deux petites filles sont ma grande joie…
J’ai également été très peinée lorsque Salomon et Esther ont perdu leur fils Emmanuel. En 2004 ou 2005, j’ai participé à la fameuse rencontre à Lyon où ils étaient venus parler de Fondation Emmanuel et du projet de Parc pour enfants à Hachmonaïm… Cette rencontre m’a permis de revoir de nombreux anciens du DEJJ.
J’avais été contactée par Daniel Haïk lors de l’écriture de son livre… Une vie d’ensemble...En 2019, je suis retournée en Israël et mon objectif était de les revoir car Salomon vieillissait et Esther avait eu un micro AVC…. Je les ai revus pour la dernière fois...
Voilà, brièvement ce que m’évoque ces années-là et je remercie par avance Jean Claude et Yves pour l’œuvre de mémoire qu’ils réalisent.
Monique ABOU
DEJJ Lyon- Saint Fons